13. Soirée publique du 11 mai 2005 organisée par Saint-Etienne Métropole

13.1 Intervention de Jaques STRIBICK pour l’association ARCO

En janvier 1989, il y a donc 15 ans, notre association arco proposait la réalisation,
à l’entrée nord de notre agglomération,
d’un Signal Architectural abritant un Centre National du Design Français

En mars 1997, il y a 8 ans, notre association, avec les Amis du Vieux Saint-Etienne, demandaient la protection de la Manufacture Impériale de Saint-Etienne,
partie historique et seule désormais subsistante, de notre MANU.

C’est pourquoi,
avec 6000 Stéphanois, habitants de Loire Sud et leur famille, nous pouvons dire : 

OUI,
à la Cité du Design
NON,
à la destruction frontale, puis centrale, puis terminale, de la Manufacture Impériale.

NON, pourquoi ?
Parce que ce serait un sacrifice inutile.
En effet, il suffit de faire évoluer l’option architecturale prise pour la Cité du Design,
2 excellentes solutions alternatives existent :

- soit le déplacement de quelques dizaines de mètres du projet GEIPEL,
à l’entrée actuelle de l’agglomération, en front du boulevard Thiers

- soit en sélectionnant la subtile proposition architecturale du 2ème lauréat du concours,
établie sur le principe de la pyramide du Louvre

Dans la 1ère solution, un protocole d’accord est à passer avec les 3 autres équipes d’architectes

Dans la 2ème solution, le cabinet GEIPEL recevra les honoraires des études entreprises

Et, dans les 2 cas, les subventions que vous avez obtenues seront maintenues
et même augmentées

Sacrifice inutile donc,
ce serait aussi un sacrifice inexplicable.
On le sait, la Cité du Design constitue un pari audacieux

Or son contenu reste largement à définir ;
- allons-nous la priver de bâtiments, soit à forte identification, soit totalement modulables ?

De plus, le thème du design concerne un public nécessairement ciblé ;
- allons-nous priver la Cité, de l’apport d’un autre public, plus large, des amateurs d’architecture, de patrimoine et d’histoire ?

Enfin, peut-on fonder un projet ambitieux sur la destruction de la fierté et de l’histoire de la ville ?

Certains d’entre vous sont allés en Italie, terre de designers,
à la triennale du design à Milan, laquelle fut fondée en 1933.
Vous avez observé que l’activité design avait un intérêt pour cette ville.
Bien évidemment,  elle constitue un plus pour son animation économique.
- Pour autant,
les milanais savent bien que leur élément d’attractivité majeur, le monument emblématique de leur cité, c’est le « DUOMO » qui, outre son rayonnement, leur apporte annuellement
40 fois plus de visiteurs que les expositions de design.

- Et bien nous, notre monument emblématique,
ce n’est pas un palais pour Dieu, c’est un palais industriel,
mais c’est aussi un univers :
quand on débouche sur l’espace ordonné de la place d’armes et de la cour d’honneur,
que l’on parcourt ses rues rythmées par les arcades,
puis, traversant les cours secrètes aux porches à frontons,
que le regard s’étale sur les parcs centenaires, dominés par châteaux et pavillons,
d’un coup, on est plongé dans l’atmosphère palpitante du Second Empire.

Sacrifice inexplicable, ce serait de plus un sacrifice déraisonnable
Après la disparition de la place des Ursules et de la perspective sur la colline des Beaux-Arts, par la construction du parking-blockhaus des Ursules,
faut-il encore supprimer la cour d’honneur et la perspective balancée de notre Manufacture, perspective la plus remarquable subsistant à Saint-Etienne ?

Pour toutes ces raisons, voici notre supplique :
élus de Saint-Etienne Métropole, nos hôtes ce soir, vous êtes en train de nous donner,
là est votre honneur,
avec l’achèvement du site LE CORBUSIER, un monument de niveau mondial.

Comment, vous-mêmes, en démantelant la Manufacture Impériale,
pourriez-vous, dans le même temps, nous enlever le Monument d’Intérêt National
qui s’offre à nous ? monument admissible à un label européen. 
Sachez-le, les analyses le prouvent, l’ensemble LE CORBUSIER,
tout promis qu’il est à un fort passage, ne pourra pas, s’il reste seul,
faire du territoire de Saint-Etienne Métropole une destination touristique.

Ainsi, la Cité du Design + la Manufacture Impériale révélée,
c’est plus d’Image, plus d’attractivité et plus d’emplois.

Allez-vous mettre en œuvre cette synergie ?
Vous en avez le pouvoir,
vous en avez la vigueur,
faites-le, merci !

 


13.2 Commentaire d'ARCO

Une présentation séduisante…
Les 3 principaux acteurs sur la Cité du Design ont apporté leur éclairage sur le projet de Cité du Design.
Michel THIOLLIERE, sénateur-maire, président de Saint-Etienne Métropole a exposé les espérances et la philosophie de la Cité du Design sur lesquelles tout le monde est d'accord.
Mr JAMOND, vice-président de Saint-Etienne Métropole, responsable du dossier, s'est attaché à en définir le contenu. Il a procédé essentiellement à une déclinaison des intentions sans pour autant en dégager les idées force et spécifiques au Centre de Design stéphanois.
Fin GEIPEL, l'architecte a présenté un projet dont on a pu observer que, pour l'essentiel, tout était déjà contenu dans les documents découverts dès l'origine en juillet 2004.

mais gravement incomplète…
L'ensemble présentait une clarté dans le propos soutenu par d'excellents moyens de techniques de présentation.
Toutefois, il y manquait cruellement des éléments illustrant ce sur quoi cette cité allait s'établir à savoir la Manufacture Impériale de Saint-Etienne. Les associations avaient demandé à Saint-Etienne Métropole, l'organisateur, que la présentation des illustrations permette au public de connaître la nature et l'ampleur du monument puissent être présentées. Elles ont reçu une fin de non-recevoir… au nom « du débat équitable »… et de « la transparence »…
Finalement, cette présentation a réussi la prouesse d'aborder de façon souvent détaillée les différents aspects du projet, sans prononcer le mot « démolition ».

…suivie d'un véritable meeting politique
La 2 ème partie de la soirée était censée être consacrée à des questions.
Or, elle était, en réalité, organisée comme un meeting politique. Une bonne partie de la salle était visiblement en service commandé capable d'applaudir un simple nom, sans attendre l'expression d'une idée.

Après 2 ou 3 interventions de la salle, dont celle de Jacques STRIBICK, délégué général d'ARCO, Michel THIOLLIERE, à l'occasion d'une très longue reprise de parole, a de nouveau développé le processus d'appel à concours et de sélection du projet par un jury.
Il a évoqué à de très nombreuses reprises le terme de « procédure démocratique », terminologie abusive car si effectivement il y a eu usage, obligatoire, d'une procédure réglementaire, elle n'a en revanche, à aucun moment, eu un caractère démocratique :
Rappelons que le cahier des charges, source de toutes les difficultés actuelles, a été conçu dans le secret d'un bureau d'études, sans aucune concertation.

Bientôt, s'est révélée une organisation orientée de l'attribution du micro.

Franck MAUREL, délégué départemental de la SPPEF, s'est vu arracher le sien après quelques mots où il tentait d'expliquer la qualité constructive de la Manufacture Impériale. Non seulement il fut ainsi privé de parole mais celui qui était censé tenir le rôle d'animateur s'est tout à coup transformé en censeur en indiquant que des détails sur la qualité des pierres échappaient à la compréhension de beaucoup dans la salle ; il s'était bien gardé de faire ce type de commentaires lorsque M. Fin GEIPEL avait expliqué en des termes ultra techniques et de façon extrêmement développée la composition des plaques de verre devant revêtir son bâtiment.

Le même Fin GEIPEL s'exerçait lui aussi aux commentaires des rarissimes expressions associatives, se moquant que l'on puisse, même hors toute comparaison, évoquer le Duomo de Milan et l'Arc de Triomphe à Paris laissant comprendre d'une moue significative qu'ici il ne s'agissait en définitive que d'une manufacture qui plus est à Saint-Etienne, douloureux mépris ! Son inutile incursion dans le domaine du patrimoine fut d'autant plus malheureuse qu'il crut bon d'expliquer que le Duomo de Milan était la cathédrale qui avait le moins évolué au fil des siècles en comparaison de ses consoeurs européennes, précision infondée : le Duomo de Milan commencé en 1386 devait être achevé au début du XIXème siècle.

La suite fut à l'avenant alors qu'un micro fut laissé pendant près de 10 minutes à un converti de la platine, le même micro était refusé à Pierre TROTON, président des Amis du Vieux Saint-Etienne, association de plus de 400 personnes, la plus emblématique de Saint-Etienne en terme de patrimoine…
Ce soir-là, alors que l'invitation officielle promettait des « AVENIRS EN DIALOGUE » et un « LA CITE DU DESIGN, parlons-en ensemble », notre territoire s'est éloigné un peu plus de la notion de démocratie participative.

 

13.3 Commentaire de Jean-Claude MONNERET

RÉUNION SUR LA « CITÉ DU DESIGN « : PREMIÈRES DÉFAITES POUR LE PROJET.

Les opposants à la cité du design ont mis la mairie sur la défensive et l'ont contrainte à réagir le 12 mai au centre des Congrès. Cependant ce n'est pas eux, malgré la qualité et la pertinence de leur argumentation, qui auront infligé au projet officiel son revers le plus significatif. Mais le réel lui même, qui s'est chargé d'invalider ce que celui ci pouvait avoir d'utopique et de mal pensé.

Chaque stéphanois a bien lu les textes que l'agence Lin a publié sous forme de panneaux lors de la présentation du projet au musée d'Art Moderne en juillet et à la Foire Exposition à la rentrée. On pouvait espérer qu'en l'espace de presque un an (et en fait bien plus, puisque la question est « travaillée « dans le cadre de la majorité municipale depuis plus longtemps ), les anticipations sympathiques de monsieur Geipel se lesteraient de réalité, bref que le projet aurait avancé du point de vue de sa substance.

Or qu' a t'on vu dans l'intervention de monsieur Jamond, chargé, par le maire de présenter avec solennité lors du débat du 12 mai, le contenu enfin révélé du projet ? Il était temps...

Il faut bien combler le vide
Un discours où on déclinait tout ce que la langue française peut offrir de structures au futur : un flash forward au futur immédiat, au futur proche, au futur lointain. Mais jamais de présent ! Pas le moindre nom d'entreprise, petite, moyenne ou grande, stéphanoise, régionale, nationale, européenne ou internationale, disposée à venir ici dès l'achèvement des bâtiments ! Pas le moindre nom d'entreprise locale concrètement intéressée et demandeuse de conseils et de finalisation de projet industriel. Pas la moindre collaboration de caractère universitaire qui ne soit déjà en œuvre depuis plusieurs années. Pas la moindre formation réellement diplômante nouvelle, lancée ad hoc, dont on donnerait avec précision le cursus, le nom des enseignants et le type de validation. Pas le moindre nom d'un designer de renom qui serait sur le point de venir conduire un laboratoire...

Mais en revanche, et à titre de pis aller, une reprise de la stratégie de délocalisation interne à la ville qui fait office de politique d'aménagement depuis quelques années et qui se substitue souvent à une authentique apport d'institutions ou de partenaires économiques nouveaux. En fait un jeu de chaises musicales qui veut qu'actuellement à Saint - Étienne on ferme une institution (voir le secteur cliniques et hôpitaux) pour la mettre un peu plus loin, créant ainsi une nouvelle friche dont la ville se passerait bien. Dans le cas précis de la cité du design, il faut bien combler  le  vide, alors  on  va à nouveau déplacer...

Ainsi va t-on carrément déménager les Beaux Arts sur le site de Carnot. Leur installation sur site MAS n'était pas prévue au départ. Logiquement, puisque la grande majorité des cours qui y sont dispensés n'ont rien à voir avec cette discipline. Y implanter la totalité de l'école, et non simplement le département qui s'occupe de design, sur un site voué au design, est non seulement un contresens pédagogique mais la preuve du malaise que je crois discerner quant à la viabilité, la faisabilité et le fonctionnement effectif d'un bâtiment surdimensionné par rapport à nos capacités locales, une crise dont la démission du premier directeur est un indice évident.

François Mouly a bon dos
Et à ce sujet, François Mouly a bon dos. Accueilli avec empressement, le Messie du design, partout interviewé avec dévotion, est aujourd'hui, quelques six mois après, chargé de tous les péchés, lynché en place publique. On invoque son inertie et ses scandaleux émoluments. Il n'a déçu les attentes que pour des raisons personnelles, fait-on dire aux gazettes. De bonne guerre, car le charger permet de se dédouaner ! Formulons une autre hypothèse : son échec, son incapacité à concrétiser le projet municipal me semble relever au contraire du projet lui même, et de l'extrême difficulté, sous-estimée, qu'il y a à le traduire dans les faits, à intéresser industriels et institutionnels, même avec le carnet d'adresses le mieux fourni du monde.

J'ajouterai que déplacer des Beaux Arts ne résout rien et qu'on crée un nouveau problème : que va t-on faire des locaux actuels ? Cette idée de transfert paraît de nature à accélérer la désertification entre Saint-Louis et Badouillère, avec le problème des Halles, le départ du Méliès et des Nouvelles Galeries. Ce qui fera beaucoup !

Il est donc un peu paradoxal que vous affirmiez : " Oui, la cité du design a un contenu !" de façon aussi péremptoire car ce contenu, franchement, et en toute sincérité, si on se situe en dehors des enthousiasmes de commande, et si on garde la tête froide, on peine à l'apercevoir.

Jean-Claude MONNERET

 

 

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